Au temps des lumières, un homme de lumière:
l'abbé Jean François Féraud
1725 1807
Pour en savoir plus, on se réfèrera à la thèse de Jean
STEFANINI, à laquelle le présent opuscule doit l'essentiel de sa
documentation : "Un provençaliste marseillais, l'abbé Feraud
(1725-1807)", publié aux Editions OPHRYS, en 1969, dans la collection de
la Faculté des Lettres & Sciences Humaines d'Aix-en-Provence
(nouvelle série, n° 67, 406 p.) : cet ouvrage sera cité STEFANINI, op.
laud.

Dans son Journal, Delecluze, à la date du 8 février
1827, nous rapporte les propos de son domestique, qui, le trouvant au coin
de son feu, par une matinée de ce rude hiver, lui disait :
« Ah ! monsieur, il y a vingt ans aujourd'hui que
j'aurais été bien heureux de pouvoir m'approcher d'un feu comme le vôtre !
- Pourquoi cela ? - J'étais blessé, il gelait fort et je ne savais où me
mettre. - A quelle bataille aviez-vous été blessé ? - A Eylau. C'était
hier l'anniversaire. - Comment, il y a vingt ans d'écoulés depuis la
bataille d'Eylau ? - Oui, Monsieur. - Ce fut une terrible affaire ? - Je
n'en ai jamais vu de semblable. J'étais à Austerlitz, à Iéna, mais tout
cela n'est rien, auprès d'Eylau. Je n'ai jamais tant vu de morts. Aussi,
ce n'est qu'à la quatrième fois que nous sommes entrés de vive force dans
la ville, que nous avons pu la tenir. Je n'ai jamais rien vu comme cela,
tout le monde était enragé. L'ennemi a bien perdu du monde, mais nous en
avons furieusement laissé aussi sur la place. Mais ce qui nous a fait le
plus de mal, ce sont les charpentes des maisons de la ville. Au fait ,
c'était toujours bien l'artillerie ennemie qui nous a valu cela. Les
Russes avaient une position élevée au-dessus d'Eylau d'où ils tiraient sur
les maisons à toute volée, avec des pièces de 18. C'était comme la fin du
monde. Toutes les troupes étaient écrasées dans les rues. C'est là où nous
avons perdu le plus de monde. Le lendemain de la bataille, comme qui
dirait aujourd'hui, les rues d'Eylau étaient encombrées de morts et de
débris de maisons ; on ne pouvait pas y marcher ».
(Journal de DELECLUZE, édit. Robert
Baschet,
Grasset, 1948, p. 415)
C'est au lendemain de cette effroyable tuerie, le samedi 8 février 1807,
qu'à Marseille, 6 rue Sainte-Françoise, fermait les yeux à la lumière de
ce monde un vénérable ecclésiastique de 82 ans d'âge, l'abbé Jean-François
Féraud. Il expirait, veillé par ses deux sœurs, auprès desquelles il était
venu vivre, en 1798, au retour de son exil à Ferrare, enduré par suite,
des persécutions révolutionnaires. Le bi-centenaire de sa disparition nous
invite à lui rendre, aujourd'hui, le présent hommage


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