Tableau 23
Comme une nostalgie...
Le
mois de novembre est par tradition le mois du recueillement
où nous pensons plus qu''à l'ordinaire à nos
parents, proches et amis disparus. Aussi, à ceux qui dans
l'actualité, viennent de quitter ce monde, en premier, les
artistes, les comédiens, les écrivains, au cours de ces
derniers mois, par exemple, Claude Rich, Jeanne Moreau, Mireille
Darc,Christian Millau. Le nom de ce dernier nous est surtout connu
à cause du célèbre guide gastronomique, le
Gault et Millau. Arbre qui a le tort de cacher tout un pan de
forêt, l'œuvre du signataire qui a poursuivi son œuvre
d'écrivain jusqu'à ce matin de l'été
dernier où, à 88 ans, il oublia tout simplement de se
réveiller. Or son oeuvre est plus foisonnante que
d'ordinaire on ne le pense et d'une rare qualité de tenue, de
ton et de style.
Né en 1928 à Paris il se trouva vingt ans plus tard, comme tout jeune homme, en quête d'un travail.
Il n'hésita pas, ce fut le journalisme qu'il choisit,
pratiqué à la manière parisienne, qui tend
à donner raison au mot de Rutebeuf: "il n'est bon bec que de
Paris".
C'est une troupe de jeune collèg
ues
qui l'embrigada et ont nom : Roger Nimier, Jacques Laurent, Michel
Déon, Nourissier que le jeune apprenti journaliste suivit
apprenant vite le métier, prompt à faire la
démonstration des qualités de sa plume dans les revues
magasines, journaux dirigés par Nimier , animateur de premier
rang: La Table Ronde, Arts, Opéra, La Parisienne.
On
peut juger de l'atmosphère grisante qui entourait ce groupe
à la verve inépuisable, en relisant l'ouvrage de
Christian Millau paru chez De Fallois en décembre 1998,
sous le titre: Au galop des hussards. C'est Bernard Frank qui les baptisa de la sorte, image qui fit florès.
Le
mentor de la petite troupe fut Paul Morand assister de Kleber Haedens
(dont il faut se garder de taire le nom, tant son influence fut
décisive sur l'orientation du groupe). La figure centrale
demeure cependant celle de Roger Nimier animateur incomparable, au
talent reconnu par tous les acteurs de cette période aussi
bien que par le public. Dans l'un des derniers ouvrages de Millau (paru
aux éditions du Rocher en 2011) son Journal impoli,
le nom de Nimier revient une quarantaine de fois aux pages de l'index
et l'ami a eu raison de reprendre les pages pathétiques qu'il
rédigea dans la hâte et l'émotion
(émotion jamais éteinte) au lendemain de la tragique
disparition de l'écrivain mort le 29 septembre 1962, date entre
toutes fatidique au sens antique du terme, comme Guy Dupré a
bien su lui aussi le montrer dans son essai Comme un adieu dans une langue oubliée, ouvrage lui aussi indispensable pour comprendre toute une époque (paru chez Grasset en 2001).
Non,
pas plus Millau que Dupré n'ont oublié, pas plus
que les Morand et Nimier, les prestiges de cette langue, dont la jeune
Parque de Valéry a su explorer toute la séduction.
Que de beautés extrêmes!!