Paul Amargier

GalerieXV. Georges  Duby


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Tableau  14


Georges Duby (1919-1996)

Il y a vingt ans, le 3 décembre 1996, Georges Duby nous quittait.
Personnellement , je l'avais connu à Saint Maximin en 1953, puis venu, à son invitation travailler auprès de lui, et sous sa direction, en 1957.
Madame André Duby, à l'heure des obsèques, me demanda de prononcer l'homélie de la messe au Tholonet.

Depuis, jour après jour, je n'ai cessé de vivre au contact de sa présence. Aujourd'hui je désire le dire publiquement.

Dans le Dialogue avec le philosophe Guy Lardreau, lui aussi à ce jour disparu, texte paru en 1980 chez Flammarion, le propos du maître historien est de s'avancer sous le feu des questions sans masque - le  larvatus prodeo cartésien n'était point de son fait -  c'est à dire que l'on peut trouver, au fil de ces 200 pages denses, tous les éléments d'un autoportrait, riche d'enseignements relatifs au métier d'historien, conçu selon l'esprit des Annales  de Marc Bloch et Lucie
Georges Dubyn Febvre.

Pour moi qui ai suivi durant plus de vingt ans son séminaire aixois,
Georges Duby, maître incomparable m'apparut toujours comme doté d'une sensibilité aux intuitions quasi-infaillibles, qualité mise au service d'une passion, celle de son métier d'historien, où l'on retrouvait les vertus de son ascendance paternelle.
Elle s'exprimait d'ailleurs dans des jugements de critique d'art.
C'est à cette occasion qu'il évoque "parmi les plaisirs les plus vifs que je prends à mon méier, il y a celui de palper ces débris, de déchiffrer, d'épeler les mots, de recoudre des lambeaux de discours.
J'ai subi, poursuit-il, l'envoûtement des archives, se retirer dans une chambre sombre, établi parmi des liasses, secouer de vieilles pousières, délier des 
nœuds depuis des décennies serrés, laisser s'éparpiller les feuilles et puis attendre que le souvenir éclose, guetter son efficience  et le lent développement de ses volutes. Dans le silence et cette odeur: le parfum même du passé..." (G.D.)

La passion le parfum, toute une sensibilité en émoi et ce qui en émerge, le  goût d'une parfaite et exquise qualité, qui mettait Duby en accord souverain avec l'art des plus grands, Braque et Bissier par exemple, qu'il fréquentait et admirait. Il m'a été donné de voir des tableaux de lui, dérobés aux regards, qui rayonnaient d'un éclat singulier.
 
A mon esprit  il est toujours apparu  j'ai eu l'occasion de l'exprimer dans l'église du Tholonet, lors de la messe) comme un reflet de la lux perpetua, venu jeter sa lumière sur nos cheminements terrestres. Ainsi que tous "les animaux de la grandes espèce", pour reprendre l'expression  chère à Du Bos pour désigner les écrivains de premier rang, au nombre desquels il appartient. Comme eux, témoin d'un supplément de lumières, que rien ne puisse ternir, telle est la marque des maîtres véritables, sûrs de leur métier, de leur imaginaire et de leur propre style.

Oui, mieux que d'autres, notre  maître nous aura fait découvrir quel
'œuvre d'art est un certain chant que le cœur d'un homme et ses mains, parfois maladroites, tirent de la beauté du monde ou de sa joie, à moins que ça ne soit de son malheur. Et ce chant prend alors un tel accent que peu à peu les hommes finissent par l'entendre et en demeurent fascinés.