Paul Amargier

Billet janvier 2011

 

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janvier 2011

1911

1911, c'est l'année  où Picasso peignait à Céret, tandis qu'à Paris Nijinsky dansait, Bergson pensait et Anna de Noailles parlait. Elle écrivait aussi et publiait depuis dix ans déjà. Dix années qui lui avaient suffi  pour établir sa  prééminence sur l'ensemble du petit monde parisien. A relire la presse de cette Belle Epoque on est saisi par l'unanimité des éloges dithyrambiques qui sont adressés à la poétesse, devenue la coqueluche du tout Paris. Admiration qui touche toutes les catégories: allant de Proust et Cocteau jusqu'à l' abbé Mugnier; dans le milieu politique, Barrès et Briand; dans les rangs de l'armée, le général  Mangin, etc. On verra aussi au premier rang de la cohorte de ses admirateurs, les Rostand père et fils. Ce dernier, Jean Rostand confessera dans Le droit d'être naturaliste "tout en elle me ravissait, m'enchantait, m'éblouissait" (p.88).

Le temps cependant n'est plus  très loin où l'opinion publique, toujours prompte à brûler ce qu'elle a adoré, désignera un quasi inconnu - de cinq ans l'aîné de Anna de Noailles - comme "le plus grand poête contemporain" (les journaux), Paul Valery. Au point que la reine découronnée, Anna de Noailles en viAnne de Noailles  commandeur de la Légion d'Honneurendra un soir, en lançant une oeillade vipérine du côté de Valery présent, à dire: "j'aurai été  le dernier poère français intelligible". ce qui entendait régler son compte à Mallarmé et à ses disciples.

Genus irritabile vatum, écrit Horace dans l'une de ses épîtres, stigmatisant le caractère irritable des gens de lettres. L'entrée des femmes en nombre dans cette arène, n'a point contribué, hélas, à en adoucir les moeurs, reconnaissons-le.

Enfin, n'oublions pas qu'Anna de Noailles fut la première femme, en France à être élevée au rang de commandeur dans l'ordre de la Légion d'Honneur, à défaut d'avoir pu être appelée à occuper un fauteuil au sein de l'Académie Française: le temps n'en était pas encore venu.


 Légende de l'image: Anna de Noailles , avec la cravate de commandeur de la Légion d'honneur. Elle fut  la première femme à obtenir cette  prestigieuse distinction, que lui remit officiellement Henri Bergson le 15 février 1931. "C'est beau, ce rouge à cotre cou que je baise tendrement", lui écrivit Colette. Et Cocteau: "Vous aurez l'ai d'une colombe poignardée" (Cl.d'Ora, B.N. Est,Arch. E.R.L.)

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